Le 7 septembre 2000, la Campagne Internationale pour
Interdire les Mines antipersonnel (ICBL), lauréat du Prix Nobel de la Paix,
publie le second Rapport de lObservatoire des Mines : un ouvrage de 1
115 pages, intitulé Rapport 2000 de lObservatoire des Mines : Vers
un monde sans mines. Ce rapport présente la situation des mines à travers
le monde : utilisation, production, commerce et stockage de mines,
déminage humanitaire et assistance aux victimes de mines dans lensemble des
pays. Une synthèse de 65 pages est également disponible.
Le rapport de lObservatoire des mines est une initiative
sans précédent de la Campagne Internationale pour Interdire les Mines afin de
contrôler la mise en uvre des dispositions du Traité dInterdiction des
mines, et plus généralement dévaluer les efforts développés par la
communauté internationale pour résoudre la crise des mines antipersonnel.
Même si des mines antipersonnel continuent dêtre posées
et de faire toujours trop de victimes, le rapport conclue que le mouvement vers
linterdiction est indéniable. Ce progrès est illustré par :
Le nombre croissant de gouvernements qui adhèrent au Traité et qui
mettent en oeuvre ses dispositions (actuellement 101 ratifications et 138
signataires, ce qui représente trois quart des pays du monde)
Une réduction de lutilisation de ces armes durant ces dernières
années
La chute considérable de la production (16 producteurs identifiés contre
54 auparavant)
Un arrêt presque total du commerce (pas un seul transfert identifié en
1999/2000)
Une intensification de la destruction des stocks de mines antipersonnel
(plus de 22 millions de mines détruites par 50 pays, dont 10 millions
depuis mars 1999)
Une augmentation des fonds consacrés à laction contre les mines (plus
de 211 millions de dollars pour 1999, soit un tiers de plus quen
1998)
Une diminution du nombre de victimes de mines dans les pays les plus
affectés par la prolifération des mines tels que lAfghanistan, la
Bosnie-Herzégovine, le Cambodge et le Mozambique
Une augmentation des zones déminées (en 1999 sept des plus importants
programmes de déminage de mines et dengins non explosés ont abouti au
nettoyage de plus de 168 millions de mètres carrés de terres).
Le rapport 2000 de lObservatoire des Mines aboutit à dautre
conclusions essentielles, pour la période qui mène de lentrée en vigueur
du Traité dInterdiction des Mines en mars 1999 au mois de mai 2000 :
LObservatoire des mines a identifié 88 pays gravement affectés par la
prolifération des mines et des engins non explosés, un nombre plus élevé
que prévu
Les recherches de lObservatoire des mines indiquent que de nouvelles
victimes de mines et dengins non explosés ont été identifiées dans 71
pays depuis mars 1999. La majorité (39) de ces pays nétaient pas en
situation de guerre. Les pays où lon recense le plus de victimes pour
cette période sont lAfghanistan, le Cambodge et, à la surprise
générale, la Birmanie. Un nombre significatif de nouvelles victimes a
également été signalé en Angola, en Tchétchénie et au Kosovo.
Des programmes humanitaires daction contre les mines sont développés
dans 41 pays. Des enquêtes et des évaluations ont été menées dans 24
pays, et la première principale étude dimpact de niveau 1 sest
achevée au Yémen en juillet 2000.
LObservatoire des mines na établi aucune preuve crédible et
vérifiable de la violation par un Etat partie des dispositions centrales du
Traité dInterdiction des Mines, relatives à linterdiction de lutilisation,
de la production et du commerce de mines.
Au cours de la période qui va de lentrée en vigueur du Traité en
mars 1999 à mai 2000, des mines ont apparemment été utilisées dans 20
conflits menés par 11 gouvernements et au moins 30 groupes rebelles et
acteurs non étatiques.
En plus de lutilisation continue de mines par lAngola, signataire du
Traité, deux autres signataires semblent avoir utilisé des mines entre
1999 et 2000, le Burundi et le Soudan.
Des mines antipersonnel ont été utilisées dans trois nouvelles zones de
conflit depuis mars 1999 : en Tchétchénie par les forces russes et
les rebelles tchétchènes, aux Philippines par trois groupes rebelles et au
Cachemire par des militants pakistanais, et apparemment par des troupes
armées pakistanaises.
Cest en Tchétchénie que lObservatoire des mines a relevé lutilisation
de mines antipersonnel la plus importante depuis 1999, notamment par les
forces russes, ainsi quau Kosovo, principalement par les forces
yougoslaves, mais également par les forces de lArmée de libération du
Kosovo. Lutilisation des mines en Tchétchénie continue aujourdhui.
Les opérations de déminage humanitaire au Kosovo doivent également faire
face à plus de 15 000 munitions à fragmentation non explosées larguées
par les forces aériennes de lOTAN. Lutilisation massive de mines par
des non signataires du Traité dInterdiction des Mines, dans ces deux
conflits seulement, témoigne du fait que lutilisation de mines pour la
période que couvre le rapport 2000 a été plus importante que lors de la
période précédente.
Lutilisation de mines se poursuit, et augmente dans certains cas, en
Birmanie (Myanmar) par les forces gouvernementales et par au moins dix
groupes ethniques armés, au Sri Lanka par le gouvernement et par les forces
rebelles, au Népal par les rebelles maoïstes, en Afghanistan par les
forces dopposition, en Angola par le gouvernement et les forces rebelles,
en République démocratique du Congo par le gouvernement et les forces
rebelles, sur la zone de conflit le long de la frontière Ethiopie /
Érythrée par les forces érythréennes, au Sénégal par les forces
rebelles, en Ouganda par les forces rebelles, en Somalie par diverses
factions, en Colombie par les forces rebelles, au Liban Sud par Israël et
des acteurs non étatiques, en Georgie par des acteurs non étatiques et
enfin en Turquie et au Nord de lIrak par des forces rebelles.
Des allégations continues mais non confirmées, ont été faites sur lutilisation
des mines par les armées de trois états parties du Traité dInterdiction
des Mines au cours de cette période Rwanda, Ouganda, et Zimbabwe
dans le délicat conflit régional en République Démocratique du Congo.
Alors que 29 pays signataires du Traité dinterdiction des mines ont
déposé les instruments de ratification depuis mars 1999, seulement trois
nouveaux pays ont adhéré au Traité (Tadjikistan, Libéria, et Nauru)
LObservatoire des Mines estime quil reste plus de 250 millions de
mines antipersonnel dans les arsenaux de 105 nations, dont les plus
importants se trouveraient en Chine (110 millions), en Russie (60-70
millions), en Biélorussie (10-15 millions), aux Etats-Unis (11 millions),
en Ukraine (10 millions), au Pakistan (6 millions), et en Inde (4-5
millions)
21 nations du Traité dInterdiction des Mines ont achevé la
destruction de leurs stocks, et 24 autres sont en cours. 17 Etats parties
doivent désormais entamer leur destruction, qui doit être achevée dans
une période de quatre ans.
115 chercheurs de lObservatoire des Mines dans 95 pays ont
systématiquement collecté et analysé les informations provenant de sources
très variées dans lobjectif daboutir à ce rapport exhaustif et complet.
Louvrage contient également en annexe des rapports réalisés par les
principaux acteurs du mouvement dinterdiction des mines, tels que les
gouvernements-clés, les organisations régionales, les agences des Nations
Unies et le Comité International de la Croix Rouge.
ICBL a reçu le Prix Nobel de la Paix en 1997 pour ses efforts en faveur de léradication
des mines antipersonnel. LObservatoire des Mines est coordonné par
un groupe de pilotage formé par cinq organisations : Human
Rights Watch, Handicap International, la coalition kenyane contre les mines,
Mines Action Canada, et Norwegian Peoples Aid.